« Génération 49.3 »

Quelque chose de tout à fait inédit se passe en France et ceux qui dirigent le pays, mais aussi nombre de ceux qui contestent le pouvoir actuel, n'y comprennent rien. On sent aujourd’hui des relents de Mai 68, cette autre révolte qui a vu coaguler à un certain moment la radicalité d’un mouvement ouvrier fortement structuré avec la créativité débridée d’une jeunesse qui en avait tout simplement marre du monde ancien. Certes, celui-ci a fini par surmonter la crise qu’il vivait, mais il en est resté plus qu’un simple quelque chose. Aujourd’hui la France revit des événements et surtout une ambiance qui font irrésistible penser à ceux d’il y a un demi-siècle déjà. Du côté du Palais on s’accroche à une réforme des retraites dont à peu près personne, à tort ou à raison, ne veut, mais on passe à nouveau totalement à côté de l’essentiel, ce ras-le-bol qu’incarne désormais une jeunesse désorientée dont la macronie prétend cependant vouloir protéger l’avenir. « La politique menée par le chef de l’Etat a créé un sentiment d’injustice, d’abandon et de révolte auprès des jeunes générations, qui auraient pourtant pu être ses alliées s’il avait su leur parler », commente à cet égard Libération, qui titre sur la « génération 49.3 ».  La violence policière contribue largement à approfondir le nouveau fossé qui se creuse entre la jeune génération et ceux qui dirigent le pays. Le magazine littéraire ActuaLitté nous explique ainsi, comme un exemple frappant, la montée du sentiment de révolte chez les libraires et bibliothécaires, une profession qui verse traditionnellement assez peu dans la violence politique et autour de laquelle s’est créé spontanément un mouvement qui s’est baptisé un peu ironiquement le Book Bloc, allusion à ces casseurs avec qui ils n’ont pourtant absolument rien de commun. Un groupe qui brandit des livres dans les manifestations. C’est l’arrestation et le maintien en détention totalement arbitraires d’une libraire qui, comme tant d’autres ces jours-ci, a eu comme seul tort de s’être trouvée au mauvais endroit au mauvais moment, qui a mis chez eux le feu aux poudres.

L’élite macronienne, de plus en plus coupée de ce qui vit dans la population et surtout dans la jeunesse, continue à s’accrocher à son projet de réforme des retraites, tant détesté ailleurs que chez les plus âgés, à penser en termes de confrontation politique et sociale. La surdité de ce président qualifié à juste titre de monarque républicain et à qui on a très tôt collé l’étiquette de jupitérien, fait irrésistiblement penser à celle des gaullistes en 68. On peut même se remémorer le célèbre échange entre le duc de La Rochefoucauld et Louis XVI le soir du 14 juillet 1789, le roi et s’étonnant de voir éclater les troubles dans la rue : « Mais c’est une révolte ! » - « Non, Sire c’est une révolution. » Même si on ne peut évidemment pas comparer les deux situations en cause, on déplorera un même déni de réalité, un même aveuglement du souverain qui s’est enfermé dans sa tour d’ivoire.

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